Bilan du suivi simultané hivernal des sites à Minioptères de Schreibers en Franche-Comté
Le Minioptère de Schreibers est une espèce menacée strictement cavernicole dans le choix de ses gîtes, et protégée, tout comme ses habitats, sur le territoire français et européen. Grégaire, il fréquente un réseau de plusieurs gîtes souterrains tout au long de son cycle annuel et saisonnier (hibernation, transits, reproduction, repos).
L’espèce effectue des déplacements saisonniers au sein d’un réseau de gîtes auquel elle reste fidèle. Les limites géographiques de la population sont méconnues, mais il est supposé que le territoire fréquenté par la métapopulation de l’Est de la France s’étend sur la Suisse, l’Alsace pour quelques sites de quelques dizaines d’individus, à la Bourgogne (pour quelques centaines d’individus) au Nord de l’Auvergne-Rhône-Alpes avec les départements de l’Ain et du Nord de l’Isère, soit le sud du massif karstique du Jura pour ce plusieurs milliers d’individus. La Franche-Comté est au cœur de la zone de répartition de cette métapopulation, qui est encore actuellement la plus septentrionale.
L’espèce est vulnérable au dérangement et modifications de l’environnement des cavités. Depuis l’important épisode d’épizootie survenue en 2002 en France ayant réduit drastiquement les effectifs de Minioptères, les tendances d’évolution des effectifs (hivernant et reproducteur) restent en diminution. Ces chutes d’effectifs sont encore mal cernées pour les territoires les plus excentrés de la zone de répartition de l’espèce, dont fait partie la Franche-Comté. Afin de comprendre les tendances démographiques de la méta-population supposée du Nord Est de la France, des dénombrements d’individus sont organisés à différentes phases du cycle du Minioptère dans les cavités connues comme fréquentées par l’espèce. Du 24 au 26 janvier 2020, un comptage dit simultané des cavités à Minioptères de Schreibers a été réalisé sur l’ensemble du territoire de la Franche-Comté : il s’agit d’effectuer un dénombrement des individus de l’espèce, dans un pas de temps très court et sur un maximum de cavités connues pour héberger l’espèce en hibernation. Ce comptage simultané est réalisé en coordination avec d’autres régions/départements concernés par la métapopuation (ex-région Bourgogne, Ain) pour obtenir une image globale des effectifs de Minioptères.
Pour réaliser ce suivi de grande ampleur, la CPEPESC Franche-Comté a fait appel à son réseau de bénévoles. 14 personnes sont venues appuyer l’équipe salariée pendant 3 jours. 20 cavités, connues comme site d’hibernation pour l’espèce Minioptère de Schreibers, ont été prospectées sur l’ensemble de l’ex-région Franche-Comté : 6 dans le Doubs, 9 dans le Jura et 5 dans la Haute-Saône. Parmi ces cavités, 11 présentent un intérêt national, voire international, et 5 un intérêt régional. 5 sites ont été prospectés en ex-région Bourgogne (information SHNA).
Sur les 20 cavités prospectées en Franche-Comté, 13 sont occupées par l’espèce Minioptère de Schreibers en période hivernale. Sur ces 13 cavités occupées, un total de 3 834 individus de Minioptère a été dénombré. 6 cavités présentent des effectifs de Minioptère inférieurs à 4 individus. Les effectifs majeurs (supérieurs à 100 individus) sont localisés dans 3 cavités. Le site majeur d’hibernation de Fretigney regroupe 60% des effectifs franc-comtois totaux de Minioptères dénombrés en hiver cette année.
Avant l’épizootie de 2002, l’estimation de la population de Minioptères hivernante en Franche-Comté était de 25 000-30 000 individus. A l’hiver 2004-2005, cette estimation avait chuté à 17 000 individus. L’estimation de la population hivernante en Franche-Comté peut être estimée à désormais moins de 10 000 individus. Ces résultats en période hivernale sont également à relier aux conditions climatiques régulièrement au-dessus des normales saisonnières. Il semblerait que dans le cas d’hiver peu rigoureux comme 2013-2014, les individus préfèrent les sites ordinairement fréquentés en transit. Le mois de janvier 2020 a été marqué par une grande douceur, avec des températures supérieures aux normales de saison, et un nombre de jours de gel et de pluie en dessous des normales. Ce phénomène de diminution des effectifs dans les sites d’hibernation principaux implique de s’interroger également sur l’existence de sites d’hibernation non encore connus en Franche-Comté, et sur un éventuel report des animaux sur des sites hors Franche-Comté.