Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Impacts de la pollution lumineuse sur les chiroptères.

publié le6 février 2000

Les chauves-souris sont adaptées à l’environnement nocturne et souffrent d’une pollution lumineuse croissante. L’illumination et les lampadaires ne sont pas sans incidence sur le comportement des insectes et donc du comportement de chasse des chiroptères(1).
Beaucoup d’insectes sont attirés par la lumière :

– leur reproduction est entravée car les femelles ne déposent plus leurs pontes sur les plantes nourricières.

– ils sont sur-prédatés car ils se concentrent au même endroit.

L’éclairage nocturne fait disparaître certaines espèces de chauves-souris. Certaines espèces du genre Nyctalus, Vespertilio, Eptesicus et Pipistrellus bénéficient de l’attraction des insectes sous les lampadaires (2).

Mais quel est l’impact pour les chauves-souris présentes, et notamment celles qui ne tirent pas profit de l’éclairage comme Plecotus spp., Myotis spp. et Rhinolophus spp. lors de l’illumination d’un village ?(3).

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Lorsque des éclairages sont installés sur leur chemin de transit vers les zones de chasse, elles doivent prendre d’autres chemins plus longs ou plus risqués, voire abandonner des sites de chasse (5).
Lorsque les sorties de gîtes d’élevage des jeunes sont éclairés. Certaines espèces attendent l’extinction des lumières avant de sortir chasser. Pour d’autres la moitié des individus sortent chasser avant l’arrêt de l’éclairage; mais les sorties sont retardées. Ainsi les chauves-souris se nourrissent moins longtemps de plus elles manquent le pic d’activité des insectes qui a lieu au crépuscule. Les jeunes ont un retard de croissance en taille et en poids et leurs chances de survivre à l’hiver à venir diminue (4).

La répartition européenne du Petit rhinolophe semble illustrer l’impact de la pollution lumineuse. Cette espèce a quasi disparue de Belgique, d’Ile de France et des Bouches du Rhône.

Une étude récente (4) a montré que l’éclairage direct des chauves-souris (ici des colonies de Grand rhinolophe, Murin à oreilles échancrées et Petit murins) vivant dans des bâtiments plus ou moins illuminés et non-éclairé, mais dans des bâtiments proches les uns des autres.
Les chercheurs ont étudié et comparé les dates des naissances, la masse corporelle et la longueur de l’avant-bras de ces chauves-souris et ont constaté que l’éclairage artificiel retardait le développement des jeunes ces espèces et qu’il pouvait parfois même anéantir toute une colonie. Les petits étaient significativement plus petits dans les bâtiments illuminés que non-éclairés. Les différences de longueur de l’avant-bras et de masse corporelle suggèrent qu’après l’accouchement le taux de croissance des jeunes est plus faible dans les chauves-souris vivant dans les bâtiments illuminés.

Une autre étude, encore plus récente (5), a réalisée un projet expérimental pour fournir les premières preuves d’un effet négatif de la pollution de la lumière artificielle sur le comportement des routes de vol d’une espèce de chauve-souris menacée (Petit rhinolophe, Rhinolophus hipposideros). Des lampes à haute pression de sodium imitant l’intensité et le spectre de la lumière lampadaires le long des itinéraires de trajets du Petit rhinolophe ont été installées. L’activité des chauves-souris a été réduite de manière spectaculaire et l’apparition des sorties de gîte a été retardée en présence de l’éclairage sans signe d’accoutumance. Ces résultats démontrent que la pollution lumineuse a des impacts négatifs sur le choix des itinéraires de vol par les petits rhinolophes.

1. BEAUDOIN, L. 1985. Le comportement des animaux en présence de sources lumineuses (théorie de l’éclairement directionnel). Cah. Liais. OPIE 19(3-4): 25-41.

2. RYDELL, J. & P.A. RACEY. 1995. Street lamps and the feeding ecology of insectivorous bats. Symp. zool. Soc. Lond. 67: 291-307.

3. ARLETTAZ, R., S. GODAT & H. MEYER. 2000. Competition for food by expanding pipistrelle bat populations (Pipistrellus pipistrellus) might contribute to the decline of lesser horseshoe bats (Rhinolophus hipposideros). Biological Conservation 93 : 55-60

4. BOLDOGH, S., D. DOBROSI & P. SAMU. 2007. The effects of the illumination of buildings on house-dwelling bats and its conservation consequences. Acta Chiropterologica, 9(2) : 527-534.

5. STONE, E.L., G. JONES & S. HARRIS. 2009. Street Lighting Disturbs Commuting Bats. Current Biology 19 : 1123-1127.