Agrément associatif : La moralité des dirigeants de la CPEPESC pose question jusque dans les colonnes du Journal Officiel !
Par une question écrite, publiée au Journal Officiel du 22 octobre 2013 (page : 10961, QE n° 40368), un député du Doubs, » interroge M. le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie sur les formalités et dispositifs réglementaires prescrits dans le cadre de la procédure de renouvellement de l’agrément des associations au titre de la protection de l’environnement. Dans le cas précis, la Commission de protection des eaux, du patrimoine, de l’environnement, du sous-sol et des chiroptères (CPEPESC) est une association régionale franc-comtoise qui rassemble des citoyens épris de nature, qui défendent un patrimoine naturel de plus en plus menacé.
L’association a été agréée pour la première fois le 10 juillet 1992. Représentant un tissu de bénévoles issus des quatre départements franc-comtois, elle oeuvre depuis sa création en 1983 au maintien de l’environnement dans un état conservation favorable. À ce titre, l’action de l’association ne se limite pas à mettre en oeuvre une politique de sensibilisation et de participation aux décisions ; son but est d’abord de contribuer à faire respecter les lois de la République en faveur de la protection de la nature. C’est pourquoi, lorsque des atteintes à la législation environnementale sont constatées, la CPEPESC n’hésite pas à ester en justice dans l’intérêt général et bien compris de l’environnement. Ses résultats confèrent une légitimité à son action contentieuse qui ne saurait être taxée de « procédurière ».
Par courrier en date du 26 avril 2013, cette association a sollicité une demande de renouvellement d’agrément régional suite au décret n° 2011-832 du 17 juillet 2011 relatif à la réforme de l’agrément des associations au titre de la protection de l’environnement. Or, suite à cette demande, les membres de son conseil d’administration ont été informés par les gendarmes venus les visiter qu’ils faisaient individuellement l’objet d’une enquête de moralité diligentée par le procureur de la République. Membre du réseau d’associations de France nature environnement depuis de nombreuses années, la CPEPESC n’a auparavant jamais fait l’objet d’une attention aussi particulière de l’administration. Aussi peut-on s’interroger sur les éléments qui ont conduit à diligenter une enquête de moralité, et si celle-ci est prévue dans les textes.
À notre connaissance, la production des pièces exigées à l’article 2 de l’arrêté du 12 juillet 2011 « relatif à la composition du dossier de demande d’agrément au titre de la protection de l’environnement, du dossier de renouvellement de l’agrément et à la liste des documents à fournir annuellement (NOR : DEVD1118525A) », et notamment le détail de l’activité associative des 5 dernières années, constituent normalement les formalités nécessaires et suffisantes au renouvellement d’un agrément au titre de l’article L. 141-1 du code de l’environnement.
Cette enquête a été perçue par les intéressés comme une atteinte à la vie privée, voire une manoeuvre d’intimidation destinée à décourager les volontés bénévoles, alors même que la charte de l’environnement confère à chacun le devoir constitutionnel de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement.
Il lui demande de bien vouloir lui expliquer les raisons qui ont motivé de telles pratiques d’intrusion dans la vie privée, de faire la lumière sur l’autorité qui a diligenté cette enquête et ce qu’elle entend par « enquête de moralité », et l’interroge sur les mesures qu’il entend prendre pour mettre fin à ce genre de pratiques inacceptables ».
NDLR
Reviendrait-on au bon vieux temps? Sera t-il exigé demain, des
certificats de bonnes mœurs, comme celui délivré en 1931 à un habitant de la Chaux-du-Dombief (39) et qui pourrait servir de modèle à nos autorités…Voir ce savoureux document.
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Notes postérieures à la publication de cet article
– Le 25 février 2014: le ministère de l’écologie n’avait pas encore répondu au député, celui-ci a renouvelé sa demande.
– Le 3 avril 2014, cette question écrite a fait l’objet d’un changement d’attribution : C’est maintenant le Ministère de la Justice qui s’avèrerait donc à l’origine de cette enquête de moralité.
– Le 3 juin 2014 le ministère de la justice n’avait toujours pas répondu au député, celui-ci a renouvelé sa demande.
-Enfin le 2 septembre 2014 la réponse suivante du ministère de la justice à été publiée au Journal Officiel ( page : 7434) :
La procédure d’agrément des associations de protection de l’environnement est régie par le chapitre premier du titre VI du code de l’environnement. L’article R. 141-17-1 du code de l’environnement énonce que « La présentation et l’instruction de la demande de renouvellement de l’agrément ainsi que la décision de renouvellement sont soumises aux conditions prévues pour la demande d’agrément aux articles R. 141-2 à R. 141-17 du code de l’environnement ». Cette procédure prévoit que le préfet, autorité qui procède à l’instruction de la demande et qui délivre l’agrément des associations locales, sollicite l’avis du procureur général. L’article R. 141-9 du code de l’environnement dispose ainsi que « Le préfet procède à l’instruction de la demande et consulte pour avis le directeur régional de l’environnement, de l’aménagement et du logement ainsi que les chefs des services déconcentrés intéressés. Il recueille également l’avis du procureur général près la cour d’appel dans le ressort de laquelle l’association a son siège social. »
En raison des importantes prérogatives attachées au statut d’association agréée pour la protection de l’environnement, tant en matière de participation aux décisions publiques qu’en matière judiciaire, en ce qu’elles peuvent déclencher l’action publique même en cas de préjudice indirect aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre, il apparaît important que l’avis du procureur général soit éclairé et, par conséquent, précédé de la collecte d’un ensemble d’informations significatives. L’enquête de moralité est diligentée dans ce cadre juridique précis, qui permet au procureur général de saisir le procureur de la République compétent, afin qu’il fasse procéder par les officiers de police judiciaire placés sous son autorité aux vérifications utiles permettant, par la suite, au procureur général de motiver son avis.
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