Décharge sauvage sur Scey-sur-Saône : le tribunal administratif enjoint la préfecture d’agir sous astreinte
En juillet 2019, la CPEPESC découvrait un dépôt sauvage de déchets à Scey-sur-Saône-et-Saint-Albin entre les lieux dits « La combe aux prêtres » et « en Baillard ». Elle déposait alors plainte avec constitution de partie civile auprès du tribunal de grande instance (désormais tribunal judiciaire) de Vesoul.
Ce dépôt, composé de briques, plaques de fibrociment, bidons métalliques, emballages, sacs poubelles et autres détritus, faisait même l’objet d’une incinération à l’aide de pneumatiques avec toutes les conséquences que cela induit.
En parallèle de cette action pénale, qui s’est conclue par un avis de classement sans suite, la CPEPESC adressait une lettre à la maire de la commune l’avertissant de l’existence de ce dépôt de déchets le 8 avril 2021 en lui demandant d’agir dans le cadre de ses pouvoirs de police qui lui sont conférés en matière de salubrité publique notamment. Sans réaction de sa part, le préfet fût à son tour interpelé.
Le silence gardé pendant plus de deux mois obligea notre association à demander une fois encore au tribunal administratif de trancher ce litige alors qu’il aurait pu tout bonnement se résoudre à l’amiable.
Les demandes de la CPEPESC étaient basiques et consistaient à demander d’une part l’annulation de la décision implicite de refus du préfet de mettre en demeure la maire de faire usage de ses pouvoirs de police, d’autre part, à enjoindre au préfet de prendre les mesures nécessaires au respect des intérêts défendus à l’article L. 541-3 du code de l’environnement, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, et sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
A la lueur des écritures des parties et au regard des éléments de faits, le tribunal administratif, par une décision du 3 juillet 2024, a d’abord écarté l’exception de non-lieu soulevé par le préfet qui faisait valoir sans fournir la moindre preuve que la parcelle concernée avait été nettoyée puis, sur les conclusions aux fins d’annulation, a estimé qu’il « ressort des pièces du dossier que, suite au signalement de la CPEPESC, le préfet de la Haute-Saône a demandé à la maire de la commune de Scey-sur-Saône et Saint-Albin, par un courrier du 3 février 2022, de faire usage des pouvoirs de police spéciale dont elle dispose en application de l’article L. 541-3 du code de l’environnement, en précisant qu’en l’absence de réponse adaptée de sa part, il lui ferait parvenir une mise en demeure. En réponse, par un courrier du 28 février 2022, la maire de la commune de Scey-sur-Saône et Saint-Albin lui a indiqué qu’elle avait adressé un courrier au propriétaire du terrain le 7 juillet 2021 afin qu’il remette le terrain en état et qu’il empêche l’accès au site, lui a adressé des photos du site fournies par le propriétaire, et a précisé qu’elle s’était rendue sur les lieux et que les installations étaient toujours en place. Toutefois, par le seul courrier adressé au propriétaire des lieux, qui ne précisait pas les sanctions encourues, la maire de la commune de Scey-sur-Saône et Saint-Albin ne peut être regardée comme ayant fait usage des pouvoirs de police dont elle dispose en application de l’article L. 541-3 du code de l’environnement. Par ailleurs, il ressort également des pièces du dossier, particulièrement des multiples photographies produites par l’association requérante, que la majorité des déchets dont la parcelle en cause est jonchée depuis 2021 n’ont pas été éliminés, et que d’autres déchets ont été ajoutés. Enfin, la seule pose d’un panneau « Décharge interdite » et de rubans de balisage n’est pas de nature à empêcher l’accès au site de manière pérenne. Dans ces conditions, la maire de Scey-sur-Saône et Saint-Albin ne peut être regardée comme ayant pris les mesures nécessaires pour assurer l’élimination des déchets dont l’abandon, le dépôt ou le traitement présentent des dangers pour l’environnement. Par suite, la CPEPESC est fondée à soutenir que le préfet de la Haute-Saône, qui ne s’est pas rendu sur les lieux afin de constater l’état du terrain, a commis une erreur d’appréciation au regard des dispositions des articles L. 541-1 à L. 541-3 du code de l’environnement en refusant de mettre en demeure la maire de la commune de Scey-sur-Saône et Saint-Albin de faire usage de ses pouvoirs de police ».
Outre l’annulation du refus d’agir préfectoral, le premier représentant de l’État a été enjoint de mettre en demeure, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, la maire de la commune de faire usage de ses pouvoirs de police en application des articles L. 541-1 à L. 541-3 du code de l’environnement afin d’assurer l’élimination des déchets dans un délai de deux mois. Les juges complètent leur dispositif en précisant que si cette mise en demeure n’était pas suivie d’effets, il appartiendra au préfet de se substituer à l’autorité municipale en application de l’article L. 2215-1 du code de l’environnement et de prendre toutes mesures utiles aux fins de prévenir les atteintes à la santé de l’homme et à l’environnement.
Ce jugement rendu le 3 juillet 2024 par le Tribunal administratif de Besançon donne ici l’occasion de rappeler la législation en matière de déchets, mais aussi et surtout les obligations des maires et des préfets dans ce domaine, qui oublient malheureusement trop souvent leurs responsabilités…