Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

« Élevage » de Visons d’Emagny (25) : du nouveau sur ce scandale vétérinaire !

publié le11 novembre 2009

Mise au point préliminaire

En octobre, des inconnus, militants de la cause animale, ont ouvert les cages à plus de 4000 visons d’un élevage de Saint-Cybranet en Dordogne.

Au-delà du problème supplémentaire que peut causer cette introduction sauvage dans la nature de visons d’Amérique (ainsi placé en concurrent du vison d’Europe, espèce en voie de disparition, protégée par la loi), la CPEPESC a toujours veillé dans ses actions à respecter les lois de la République, exigeant en corollaire que les autres, notamment les autorités –censées donner l’exemple– fassent de même.

Les lignes qui suivent montrent qu’on en est encore loin ! Une masse énorme de travail est nécessaire pour simplement obtenir que le préfet, notamment à travers ses services vétérinaires, fasse appliquer la loi à un « élevage » fonctionnant depuis des années sans autorisation et en toute impunité.

Un bon moyen, pour l’État, de susciter des vocations d’ouvreur de cages !!

Sur un autre plan, il serait peut être temps d’interdire l’élevage du vison en France, surtout dans les conditions indignes que nous connaissons, mais cela, c’est l’affaire de tous les citoyens de cœurs et de leurs élus, pour changer la loi.

Du nouveau sur « l’élevage » de visons d’Émagny

Depuis 2002, la CPEPESC s’attache à exiger des services de l’État qu’ils fassent respecter la réglementation relative à l’exploitation de l’élevage de visons d’Émagny dans le Doubs. Tâche laborieuse… Elle mène son action sur deux fronts : Code de l’Urbanisme et Code de l’environnement.

– Au niveau du Code de l’Urbanisme :

Par jugement rendu le 26 juin 2008, le Tribunal administratif de Besançon avait sanctionné la commune d’Émagny, qui, sous pression de la chambre d’agriculture du Doubs et devant la magnanimité de l’État, avait accepté de réviser son plan d’occupation des sols (POS) pour permettre à un éleveur de visons de régulariser sa situation administrative illégale.

Petit rappel : le tribunal avait d’abord admis que la procédure d’enquête publique était entachée d’illégalité eu égard à l’absence dans le dossier d’enquête publique d’une notice présentant la construction : « qu’il ressort des pièces du dossier que l’additif au rapport de présentation n’indique pas notamment l’emplacement précis de la construction envisagée et ne présente pas ne serait-ce qu’une esquisse des plans du ou des bâtiments dont la construction est envisagée, ce qui apparaît pourtant indispensable concernant un bâtiment qui doit pouvoir accueillir plus de 10 000 visons et dont la hauteur maximale prévue est de 10 mètres ».

Avant d’admettre sur le fond, que le projet était dénué d’intérêt général, motif pourtant indispensable pour engager une procédure de révision simplifiée d’un POS : « qu’il ressort des pièces du dossier que, depuis, de nombreuses années, M. Raunet s’est évertué à ne respecter ni les règles relatives au droit de l’environnement ni celles relatives au droit de l’urbanisme ; que l’activité d’élevage de M. Raunet ne représente au plus que deux emplois sur la commune, à savoir ceux de M. Raunet et de son fils ; que la commune ne produit aucune donnée chiffrée sur l’avantage financier que le contribuable local pourrait retirer du maintien de cette activité sur la commune alors que, tout au contraire , il n’est nullement établi que le projet envisagé ne sera pas préjudiciable aux finances de la commune ; qu’il ressort ainsi des pièces du dossier que le projet envisagé, à l’origine de la révision simplifiée, ne présentait pas un intérêt général et n’avait en réalité d’autre objet que de tenter de régulariser la situation illégale de l’exploitation de M. Raunet ».

La commune, de manière totalement indéfendable, avait décidé de faire appel de cette décision. Mal lui en a pris puisque la Cour administrative d’appel de Nancy, par jugement rendu le 8 octobre 2009, a confirmé la décision de première instance et condamné, aux dépens, la municipalité d’Émagny à verser à la CPEPESC 1500 euros.

La Cour Administrative d’Appel de Nancy a suivi à la lettre la décision du Tribunal Administratif de Besançon. En voici un extrait :

« Considérant, en troisième lieu, que la commune d’Émagny soutient que la révision simplifiée approuvée par la délibération contestée avait pour objet la réalisation d’un projet à caractère privé présentant un intérêt général et consistant dans l’extension et la mise aux normes d’un élevage de visons ; que cette délibération prévoit à cet effet le classement en zone ND et classé comme espace boisé par le plan d’occupation des sols communal ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet en cause aurait une réelle incidence sur le maintien ou le développement de l’emploi sur le territoire de la commune ; que, par ailleurs, la révision simplifiée du plan d’occupation des sols ne garantit pas, par elle-même, que l’exploitant, qui exerce depuis de nombreuses années son activité en méconnaissance de la législation relative aux installations classées pour la protection de l’environnement, se conformera à cette législation après cette révision ; qu’enfin, l’intérêt éventuel du projet pour la commune ne peut également être apprécié indépendamment de l’impact négatif sur l’environnement qu’entraîne la suppression d’un espace boisé ; que, dans ces conditions, c’est à bon droit que le Tribunal s’est également fondé, pour annuler l’arrêté attaqué, sur le moyen tiré de ce que le projet envisagé, à l’origine de la révision simplifiée, ne présentait pas un intérêt général, en méconnaissance des dispositions précitées de l’article L. 123-13 du code de l’environnement. »

Une victoire pour une notre association, mais peut-être de courte durée, car la commune, nous venons de l’apprendre, vient de lancer une procédure (complète cette fois) de révision du POS en PLU. Nul doute que la proposition de modifier le statut de l’espace boisé classé sera de nouveau à l’ordre du jour.

– Au niveau du Code de l’environnement :

Saisi par notre association, le Tribunal administratif de Besançon, par jugement rendu le 28 février 2008, demandait au préfet de faire exécuter d’office, et sous astreinte, à la charge de l’exploitant un certain nombre de travaux et mesures conservatoires afin de remédier d’urgence aux dangers que représente cet élevage pour l’environnement au titre de l’article L. 511-1 du Code de l’environnement.

Or en juin 2009, soit plus d’un an après que cette décision ait été rendue, force est de constater que les mesures d’exécution prescrites n’ont pas été prises.

L’État persévérant dans son comportement habituel, qui consiste à gagner du temps pour ne pas agir, la CPEPESC a saisi de nouveau le TA pour demander la liquidation de l’astreinte. Le tribunal a suivi et a condamné le préfet du Doubs à verser 8000 euros à notre association :

Perspectives

Ces décisions juridiques récentes devraient permettre à la CPEPESC d’exiger la suspension de l’activité de l’élevage dit du Haut si le préfet ne s’y résout pas très rapidement. Une lenteur ou un refus d’agir de la part du représentant de l’État, obligera l’association à solliciter une nouvelle fois l’arbitrage du tribunal.

NDLR:
Article précédent de ce site sur ce dossier :
« Élevage » déplorable de visons à Émagny (25) : enfin un premier jugement de bons sens !