Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Le Plan national sur les Résidus de Médicaments dans l’Eau (PNRM) présenté.

publié le31 mai 2011

Un plan national pour lutter contre les résidus de médicaments dans l’eau
Le premier Plan national sur les résidus de médicaments dans l’eau, élaboré par les ministères en charge de l’Écologie et de la Santé a été présenté le 30 mai 2011. L’objectif annoncé est d’évaluer le risque éventuel lié à la présence de molécules liés aux médicaments dans l’eau, les conséquences possibles pour l’écosystème et l’homme et d’engager des actions de réduction de la dispersion médicamenteuse dans l’eau.

La présentation de ce plan est d’abord l’occasion de prendre conscience de la montée de ce problème crucial et de ses impacts dans l’environnement.

D’où viennent les résidus de médicaments ?

La France est le 4ème consommateur mondial de médicaments et le 1er au niveau européen. Plus de 3 000 médicaments humains et 300 médicaments vétérinaires sont actuellement disponibles sur le marché français.

Le marché des médicaments

Pour les médicaments à usage humain :

Les principaux marchés en 2009, en % du marché mondial, sont :
• USA : 43,6 %
• Japon : 11,6 %
• France : 5,9 %
• Allemagne : 5,9 %
• Italie : 3,4 %
• Espagne : 3,0 %
• Royaume-Uni : 2,9 %

On constate que la France est le 1er marché de l’Union européenne, avec l’Allemagne qui compte cependant 30 % d’habitants en plus ; le marché du Royaume-Uni quant à lui, représente la moitié du marché français.

Pour les médicaments vétérinaires :

La France est le 1er marché de médicaments vétérinaires de l’Union européenne et le 2ème dans le monde après les Etats-Unis. Position qui peut s’expliquer par l’importance de l’élevage français, toutes espèces confondues.

Les médicaments sont des molécules fabriquées pour être biologiquement très actives. Elles appartiennent de plus à des familles de structures chimiques très diverses. Lors de la prise d’un médicament par une personne ou lors de son administration à un animal, une partie n’est pas totalement utilisée ou bien dégradée dans l’organisme. Ce sont ces « résidus de médicaments » qui seront excrétés dans les selles et les urines, rejoignant ainsi les réseaux des eaux usées ou l’environnement.

Ainsi, on peut retrouver des résidus de médicaments dans les milieux aquatiques et l’environnement en général, à partir de différentes sources :

– les rejets des eaux usées : après collecte dans les réseaux d’assainissement et à la sortie des stations de traitement ;

– les rejets d’effluents issus d’activités d’élevage : soit directement dans le milieu
(activités piscicoles par exemple) ou par ruissellement, après épandage sur les sols agricoles ;

– vient s’ajouter à ces deux premières sources celle des médicaments directement jetés « à l ‘évier » plutôt que d’être ramenés en pharmacie pour le recyclage.

Actuellement, on estime que le gisement de médicaments non utilisés représente entre 24 000 et 29 000 tonnes par an. Une partie se retrouve ainsi jetée à l’égout.

Que sait-on actuellement sur la présence des médicaments dans les eaux ?
Milieux aquatiques

Antibiotiques, antidépresseurs, bêtabloquants… mais aussi médicaments à usage vétérinaire (antibiotiques, hormones, antiparasitaires) sont autant de substances qui sont bien présentes dans les milieux aquatiques.
Pour autant, il n’existe pas à ce jour de valeurs de référence permettant d’estimer leur impact :
pas de limite réglementaire pour les résidus de médicaments dans les eaux (eau potable, milieux aquatiques ou rejets) ou de réglementations, européenne ou française, demandant de les rechercher systématiquement.

Les premières recherches de traces de médicaments dans l’environnement remontent aux années 1980. Certaines études ponctuelles issues d’activités de recherche ont montré la présence de molécules à usage thérapeutique ou diagnostic à des concentrations pouvant varier de l’ordre de la dizaine de nanogrammes par litre (ng/l) pour les eaux souterraines et les rivières au microgramme par litre (μg/l) pour les effluents de station de traitement des eaux usées.

Certains produits sont retrouvés dans les effluents à des concentrations proches des seuils
de toxicité pour les écosystèmes mais les effets à long terme des mélanges ne sont pas connus et difficiles à évaluer.

Eau potable

Une campagne nationale de mesure dans l’eau potable et les eaux servant à en faire a été confiée en 2009 par le ministère en charge de la santé au Laboratoire d’Hydrologie de Nancy (Anses), avec l’appui des agences régionales de santé. Les résultats en ont été rendus publics en février 2011.

Quelques résultats :

Pour l’eau potable

– Pour 75 % des échantillons d’eau traitée, aucune des 45 molécules recherchées n’a
été quantifiée ;

– Pour les 25% d’échantillons positifs, les analyses révèlent généralement la présence simultanée d’une à quatre molécules. Hormis la caféine (traceur de présence humaine), les molécules les plus fréquemment retrouvées sont la carbamazépine (un antiépileptique) et son principal produit de dégradation, ainsi que l’oxazépam (un anxiolytique).

Dans les eaux brutes (c’est-à-dire avant traitement en usine)_

– On retrouve ces trois mêmes molécules principales. Toutefois, un plus grand nombre de substances a pu être identifié à des concentrations parfois plus fortes que dans les eaux traitées. Parmi les molécules retrouvées en plus de la carbamazépine et de l’oxazépam, on peut citer : le paracétamol, le kétaprofen (anti-inflammatoire)l’hydroxyibuprofène (ibuprofène transformé dans l’organisme), l’acide salicylique (aspirine).

Quels sont les risques encourus ?

Depuis plusieurs années, la communauté scientifique, les pouvoirs publics et le public s’interrogent sur la présence dans les milieux aquatiques (eaux de surface, eaux souterraines) et dans l’eau potable, à l’état de traces, de résidus de médicaments, ainsi que sur leurs effets sur l’environnement et la santé humaine.

Aujourd’hui, sur cette question, des signaux existent :

– La présence de résidus, y compris dans l’eau potable, a été révélée par des campagnes de mesures de contamination dans les eaux utilisées pour la production d’eau potable et dans les eaux potables.

– Les hormones de synthèse ou d’autres composés qui agissent comme des hormones, même à très petites doses ont des effets potentiels. De nombreuses observations, telle la « féminisation » des poissons, confirment le risque environnemental associé à ces substances, même si les effets observés peuvent résulter de molécules à effets perturbateurs endocriniens qui ne sont pas des médicaments (pesticides, métaux, retardateurs de flamme…). Ainsi la faune aquatique connaît aujourd’hui des diminutions de population importantes.

– Les interactions possibles avec d’autres polluants déjà présents dans les milieux aquatiques (par exemple chimiques ou pesticides), appelées parfois effet « cocktail », constituent un sujet de préoccupation qui à ce jour n’a pas encore reçu de réponses claires.

– A ces différents éléments vient s’ajouter la préoccupation du renforcement de l’antibiorésistance des bactéries dans l’environnement, mises en contact prolongé et répété avec des résidus d’antibiotiques.

Ces éléments indiquent un risque émergent qui nécessite de définir une stratégie sur le moyen terme afin d’agir, en anticipation, avant d’être confrontés à des problèmes environnementaux ou de santé avérés.

En France, plusieurs équipes de recherche travaillent déjà sur ces sujets. Le Plan national sur les Résidus de Médicaments dans l’Eau (PNRM) constituera un cadre stratégique pour que leurs travaux soient conduits en synergie et valorisés ensuite dans la réglementation.

Pour l’eau potable, les concentrations trouvées dans les eaux traitées sont 1 000 à un million de fois inférieures aux doses utilisées dans le cadre des doses thérapeutiques.
Toutefois, on ne peut pas conclure immédiatement à une absence de risque du fait notamment des effets à faibles doses, des multiples effets biologiques envisageables et d’un potentiel effet « cocktail ».

C’est pour cela que les agences sanitaires, ANSES et AFSSAPS, travaillent à mettre en place une méthodologie permettant d’évaluer les risques pour la santé humaine. Cette méthodologie sera intégrée dans le Plan.

PNRM_2011.pdf

Le plan national sur les résidus de médicaments (PNRM) doit viser à répondre aux questions suivantes :

– Quel est l’impact de la présence de résidus de médicaments dans les eaux ?

– Que pouvons-nous faire pour empêcher que les résidus de médicaments ne se retrouvent dans les eaux ? Quelles sont les sources principales de résidus ?

– Quelles sont les mesures de gestion les mieux adaptées pour réduire les risques éventuels ?

L’acquisition de connaissances scientifiques et techniques et la recherche tiennent une place essentielle dans ce plan.

Le Plan a vocation à préciser les enjeux environnementaux et de santé publique liés à la présence des résidus de médicaments dans les différents compartiments aquatiques et à mettre en œuvre à court terme des mesures de gestion simples et efficaces.
Pour ce faire, il s’articule autour de trois axes majeurs :

-l’évaluation des risques par l’acquisition de connaissances scientifiques et techniques relatives à la présence, au devenir et aux effets des résidus de médicaments sur l’environnement et la santé humaine,

– la gestion des risques par des actions de contrôle et de réduction des émissions de résidus de médicaments dans l’environnement,

– le renforcement et la structuration des actions de recherche.
(Source com. de presse minist. Ecologie 30.05.2011)