Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Une étude de l’INERIS sur les polluants émergents chimiques dans les eaux

publié le14 août 2015

L’INERIS a publié le 25 juin 2015 sur son site, les résultats d’une étude prospective sur les contaminants dits « émergents » dans les eaux françaises à la demande du Ministère de l’écologie.

C’est un état des lieux de la présence de polluants peu recherchés ou mal connus fondé sur 80 000 données de recherches analytiques sur le territoire français.

La liste des substances recherchées a été limitée à environ 180 substances pour des raisons techniques et de coûts visant des produits de soin corporel ; des plastifiants, des résidus de médicaments, des pesticides et biocides, les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP), des retardateurs de flamme; des tensio-actifs (ou « surfactants »), des alkylperfluorés(1), des antioxydants ; des additifs d’essence, des organo-étains (b) et quelques molécules industrielles diverses de type naphtalène et anilines.

L’objectif de l’étude était triple : aider à définir la liste des substances à surveiller dans l’avenir, faire ressortir les « lacunes » qui nécessiteraient d’améliorer les connaissances sur les effets toxiques et éprouver en routine des méthodes de chimie analytique développées par des laboratoires.

L’étude prospective n’avait pas pour but d’évaluation du risque engendré par chaque substance sur les milieux aquatiques et selon l’INERIS ne constitue pas non plus le reflet exhaustif de la contamination des milieux aquatiques en France par les micropolluants.

rapport-etude-prospective-2012.pdf

Le réceptacle chimique des rivières

Cependant aux delà de ces objectifs cadrés, la lecture des résultats de l’étude confirme une fois de plus, ce que tous ceux qui s’intéressent aux eaux douces continentales savent déjà, c’est à dire qu’elles sont devenues le grand déversoir incontrôlé d’un grand nombres de substances de notre société chimique moderne.

L’étude souligne en autres, en ce qui concerne les 180 substances recherchées :

– Une omniprésence des plastifiants et des produits de soins corporels dans les milieux est attestée (molécules retrouvées dans 50% à 99% des échantillons sur tous les bassins hydrographiques).

– De même, les HAP sont retrouvés dans 50 à 98% des échantillons, sur tous les bassins hydrographiques.

Dans l’eau, 34 substances qu’on peut qualifier « d’omniprésentes » ont été quantifiées dans tous les bassins au moins une fois. Une grande partie des catégories d’usage est représentée : 1 additif d’essence, 1 molécule industrielle type naphtalène, 1 HAP, 4 produits de soins corporels, 12 pesticides & biocides, 9 résidus de médicaments, 5 plastifiants et 1 alkylperfluoré.

Dans les sédiments, plus de 40 substances « omniprésentes » sont retrouvées dans tous les bassins au moins une fois. La quasi-totalité des catégories d’usage est représentée : 2 retardateurs de flamme, 2 métabolites d’additifs d’essence, 3 molécules industriels (naphtalène et organo-étains), 3 résidus de médicaments, 18 HAP, 7 pesticides, 2 plastifiants, 1 antioxydant, 5 surfactants.

76% des pesticides et biocides recherchés (25 molécules) ont été retrouvés au moins une fois dans l’eau et environ 50% des phytosanitaires et biocides recherchés (21 molécules) l’ont été dans les sédiments.

75% des résidus de médicaments recherchés (17 molécules) ont été retrouvées dans l’eau et 52% (15 molécules) l’ont été dans les sédiments.

– 95% des HAP recherchés (20 molécules) sont retrouvés, exclusivement dans les sédiments (les HAP étant hydrophobes).

– 6 molécules sur 11 dans la famille des retardateurs de flamme ont été retrouvées dans les sédiments (ces retardateurs de flamme étant hydrophobes).

– 3 molécules sur 4 dans la famille des surfactants ont été retrouvées, exclusivement dans les sédiments.

– 4 molécules sur 6 dans la famille des alkylperfluorés ont été quantifiées.

Pour en savoir plus


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NDRL

(a) : Les alkyls perfluorés constituent une vaste classe chimique caractérisée par la substitution totale ou partielle d’atomes d’hydrogène par des atomes de fluor autour du carbone. On estime, qu’il existe plus de 800 substances appartenant à cette classe chimique, dont la totalité est d’origine anthropogénique. Ils sont synthétisés depuis la fin des années 40 et sont utilisés dans plus de 200 applications industrielles et domestiques (imperméabilisation de textiles, cuir et emballages, mousses anti-incendie, industrie électronique, synthèse de polymères fluorés, …).
(Voir.)

(b) : Un organoétain est un composé organique comportant au moins une liaison covalente entre un atome de carbone et un atome d’étain. L’atome de carbone lié à l’étain appartient souvent à un groupement de type -éthyle, -propyle ou -butyle. Les organoétains sont généralement peu solubles dans l’eau, mais très lipophiles. Ils sont souvent toxiques et écotoxiques. Ils sont par exemple utilisés comme stabilisateur de matières plastiques (premier stabilisant du PVC) et comme biocides dans des insecticides, fongicides, herbicides, produits de protection des bois … (Cf. )