Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Une stupéfiante enquête : « Bidoche, l’industrie de la viande menace le monde »

publié le5 octobre 2009

Fabrice Nicolino, journaliste indépendant s’il en est un, l’auteur de Pesticides, révélations sur un scandale français (éd. Fayard), vient de récidiver avec un nouveau livre sans concession Bidoche, l’industrie de la viande menace le monde (éd. LLL).

Une stupéfiante et passionnante enquête sur l’univers de l’industrie de la viande, en France et dans le monde : Cette industrie de la viande qui menace le monde, avec des faits, des noms, des dates…

Nicolino. « Ce livre ? Je crois, je sais même que les informations qu’il contient n’ont jamais été rassemblées en langue française. Il permet de comprendre la naissance et l’étonnant développement de l’élevage industriel, qui sacrifie plus d’un milliard d’animaux par an en France. J’ai beaucoup, beaucoup travaillé pour vous offrir le meilleur de ce qu’on peut trouver en cette année 2009.

Le résultat, bien que j’aie le cuir épais, me semble effarant. Nous avons nié aux animaux tout droit à l’existence. Nous avons changé des êtres sensibles en morceaux de bidoche. En choses, en objets, en marchandises abstraites ».

Pourquoi j’ai voulu ce livre

Je suis né pour ma part dans le sous-prolétariat urbain de la banlieue
parisienne. Ce n’est pas un lieu rieur. Ce ne fut pas un temps calme. Il
m’arriva plus d’une fois de rêver meilleur destin. Mais qui choisit ?
Il reste que, dans les meilleures années de cette époque engloutie à
jamais, ma mère préparait le dimanche midi un roast-beef, un rosbif farci
à l’ail qui déclenchait chez nous tous, les enfants de cette pauvre
nichée, une émeute de papilles.

Un repas peut-il rendre heureux ? Oui. Un morceau de viande peut-il faire
croire, le temps d’une tablée familiale, que tout va bien, que tout va
mieux ? Oui. J’ai mangé beaucoup de viande. J’ai pris un grand plaisir
à mastiquer, à partager avec les miens ce qui était davantage qu’un
mets. Je suis mieux placé que d’autres pour comprendre que manger de la
viande est un acte social majeur. Un comportement. Une manière de se
situer par rapport au passé maudit de l’humanité, et de défier le sort
promis par l’avenir.

Je crois savoir ce que manger veut dire. Mais je dois ajouter que, chemin
faisant, j’ai changé d’avis et de goût. Modifier ses habitudes est
l’une des vraies grandes libertés qui nous sont laissées. Je l’ai
fait. Derrière la viande, peu à peu, les morceaux, hauts et bas, se sont
reformés, comme dans les dessins animés de mon enfance, qui ignorent tout de la logique triviale de la vie ordinaire.

Derrière une côte de bœuf, j’ai fini par voir un bœuf. Derrière un
gigot, un agneau. Derrière un jambon, un cochon. On peut parler d’un
choc, immense et lent.

L’histoire que je vais vous raconter n’est pas
simple,
et j’en suis le premier désolé. Elle peut d’autant plus
paraître compliquée qu’elle l’est en réalité. Mais ce n’était
pas une raison pour faire un livre pesant. Celui-ci ne devrait pas
l’être. On y verra beaucoup d’hommes en action, prenant en notre nom
des décisions plus ou moins réfléchies. Avec des conséquences majeures
que la plupart ignorent.

Cela explique les tours, détours, ruses et contorsions d’une affaire
profonde, qui nous concerne tous.

Ce livre sur la viande commande du temps, et de la réflexion. Peut-être est-ce une mauvaise idée de le signaler d’entrée, à l’heure d’Internet et du zapping tous azimuts. Mais c’est ainsi. Au moins ne serez-vous pas trompé sur la marchandise. Il reste que cet ouvrage peut aussi se lire pour ce qu’il est : une formidable aventure aux conséquences inouïes. Où rien n’était inévitable. Où tout aurait dû être pesé. Ou tout aurait pu être
contrebalancé. Une histoire pleine de bruit et de fureur, emplie
jusqu’à déborder de qualités qui sont souvent de pénibles défauts.

Laissez-vous porter par cette vague venue des temps les plus anciens, et
posez-vous les bonnes questions, qui vous rendront fiers d’être des
humains dignes du mot.

Comment des animaux aussi sacrés que le taureau Hap de la plus haute
Antiquité sont-ils devenus des morceaux, des choses, des marchandises ?
Pourquoi des techniciens inventent-ils chaque jour, en notre nom, de
nouvelles méthodes pour « fabriquer » de la « matière » à partir
d’êtres vivants et sensibles ? Pourquoi leurs laboratoires sont-il aussi
anonymes que secrets ? Pourquoi l’industrie de la bidoche est-elle dotée
d’une puissance qui cloue le bec de ses rares critiques ?

À la suite de quelle rupture mentale a-t-on accepté la barbarie de l’élevage industriel ? Pour quelle raison folle laisse-t-on la consommation
effrénée de ce produit plein d’antibiotiques et d’hormones menacer la
santé humaine, détruire les forêts tropicales, aggraver dans des
proportions étonnantes la si grave crise climatique en cours ?

Qui est responsable ? Et y a-t-il des coupables ? La réponse n’a rien
d’évident, mais elle existe, dans les deux cas.

Ce livre vous convie à une plongée dont vous ne sortirez pas indemne.

À la condition de le lire pour de vrai, vous ferez ensuite partie d’une tribu en expansion, mais qui demeure on ne peut plus minoritaire. La tribu de ceux qui savent. Et peut-être même rejoindrez-vous celle qui ne veut plus. A-t-on le droit de se révolter ? On en a en tout cas le devoir.

Je mange encore de la viande. De moins en moins, et désormais si peu que j’entrevois le moment où je cesserai peut-être de le faire. Je ne suis
pas un exemple. Je suis exactement comme vous.

J’espère en tout cas que nous nous ressemblons assez pour que le dialogue commence. Mais avant cela, il fallait vous faire découvrir le tumulte des relations que nous entretenons avec notre sainte bidoche. Si ce livre devait servir à quelque chose, il me plairait qu’il permette à ses lecteurs de se demander ce qu’ils mangent. Et pourquoi. Et comment.”

Lien vers http://bidoche-lelivre.com/