Utilisation agricole de BROMADIOLONE en Franche-Comté : encore des manœuvres dilatoires de l’Etat préjudiciables à la préservation de la faune sauvage !
Le contrôle des populations de rongeurs à l’aide de la bromadiolone est désormais encadré par l’arrêté interministériel en date du 14 mai 2014.
Le point positif de ce nouvel arrêté concerne l’abaissement du seuil de non traitement, fixé à 33 % désormais contre 50 % antérieurement. A l’échelle d’une parcelle si le taux d’infestation de celle-ci dépasse les 33 % les traitements sont interdits. Le calcul du taux d’occupation est basé sur une méthode indiciaire.
Le point d’achoppement de cet arrêté concerne l’élargissement de la liste des espèces ciblées par cette lutte. Désormais, le Campagnol terrestre n’est plus la seule espèce, s’y ajoutent le Campagnol des champs, le Campagnol provençal et même le Mulot sylvestre, c’est-à-dire que la lutte peut concerner l’ensemble du territoire régional alors qu’elle n’était pratiquée jusqu’à ce jour que sur les communes, soit 582, du massif jurassien impliquées dans le plan de lutte.
Sur le principe d’étendre la lutte à d’autres espèces, la CPEPESC a déjà eu l’occasion de s’exprimer lors des consultations publiques. L’idée d’étendre la lutte pour la contrôler, dixit l’état, ne pouvait être envisagée que dans l’hypothèse où des moyens humains et financiers auraient été mis a disposition, ce qui n’est présentement pas le cas.
Afin de limiter les risques d’intoxication de la faune sauvage non cible, l’article 6 de l’arrêté susvisé prévoit : « Un arrêté préfectoral peut définir des zones où la lutte chimique est interdite, notamment dans les zones de présence d’espèces protégées faisant l’objet de plans nationaux d’action, après information du conseil scientifique régional du patrimoine naturel en fonction d’une analyse de risque d’impact sur la faune sauvage non cible menée dans le cadre d’un comité d’experts sous l’égide de la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF) et de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL). Cette analyse de risque repose sur l’utilisation d’un outil d’aide à la décision d’emploi de la bromadiolone dont les principes sont présentés en annexe VII. »
Dans ce cadre, la CPEPESC a apporté sa contribution () à l’élaboration de cet outil qui prévoit des mesures de restriction et d’interdiction de l’usage de la bromadiolone selon les cas et les espèces.
Elle a participé à plusieurs réunions de travail au sein du comité d’experts depuis novembre 2014. Ainsi, à titre d’exemple, la découverte d’un nid de Milan royal, espèce menacée, bénéficiant d’un plan national d’actions porté et financé par le ministère en charge de l’écologie devrait s’accompagner d’une mesure de suspension des traitements dans un rayon défini (3 km sur les communes du plan de lutte, 5 km hors plan de lutte).
Autre exemple, pour une autre espèce en danger critique d’extinction en Franche-Comté et bénéficiant également d’un plan national d’actions, la Pie-grièche grise : en période hivernale, une zone tampon de 2 km devrait être appliquée qui inclus l’absence de traitements pour éviter tous risques d’intoxication de l’espèce.
Cet outil a été validé par le groupe d’experts le 4 mars 2015. Aujourd’hui, alors que les avis de traitement tombent tous les jours ou presque et concernent des secteurs aussi variés que le canton de Levier (25), le canton de Jussey (70), etc. la procédure n’est toujours pas activée, l’État attend que la profession agricole veule bien valider cet outil. Pourtant, la consultation de la profession n’est nullement exigée par l’arrêté interministériel.
Bref, l’Etat traîne les pieds et met en œuvre tous les procédés dilatoires qu’il a coutume d’utiliser.
La CPEPESC rappelle que la préservation des espèces animales en particulier des espèces PNA est d’intérêt général et qu’à ce titre toutes mesures doivent être prises pour en assurer la sauvegarde. Les mesures entérinées par le groupe vont dans ce sens. Elles devraient donc recevoir un début d’application concret.
Nous restons persuadés de la nécessité qu’il y a à mettre en œuvre cet outil au moins pour juger de sa pertinence et de son efficacité.
Associée à une analyse a posteriori (collecte de cadavres), cette évaluation pourrait permettre de lever le voile sur les nouvelles modalités de la lutte. N’est ce pas ce que la profession recherche ? A montrer que les traitements sont « propres ».
Pleinement dans son rôle et investie de longue date sur cette question, la CPEPESC continuera à défendre une position restrictive dans l’emploi de la bromadiolone en demandant la mise en place de zones d’exclusion/restriction selon les cas et les enjeux en présence, ce qu’autorise désormais l’arrêté interministériel.