Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

11 novembre : Le « Trou de mémoire » du gouffre de Jardel (ou Jardelle).

publié le11 novembre 2007

Trou de mémoire a titré le 11 novembre 2007 l’Est-Républicain en page de Pontarlier : la veille, les autorités locales avaient inauguré Le Creux Renale à Bians-les-Usiers (25) enfin réhabilité de sa décharge.

Mais c’était pour rappeler qu’un autre gouffre, celui de Jardel, près de Chaffois (25) recèle toujours à 128m de profondeur une décharge d’obus datant de la première guerre mondiale, que l’Etat n’a toujours pas il est vrai réhabilitée.

Dommage que ce judicieux rappel à l’ordre, affirme que le gouffre a reçu « plus de 3.000 tonnes de munitions à l’ypérite, le fameux gaz moutarde, chargé d’assaisonner la chair à canons… ».
Rien ne prouve en effet à ce jour, que cet élément extrêmement toxique est présent au fond du gouffre… La masse d’obus est telle qu’il est impossible d’affirmer ou d’infirmer. Un compte rendu d’expertise affirme même que si les obus en contenaient ce gaz se serait échappé depuis longtemps… Mais le principe de précaution ?

Le premier trou de mémoire des pouvoirs publics

C’est par une dénonciation que l’existence du dépôt d’obus jetés dans Jardel en 1923 est redécouverte par l’administration qu’en 1972. L’année de la première journée de la protection de la Nature !

Une première inspection du dépôt a été effectuée par la protection civile avec l’aide du spéléo-club du CAF de Pontarlier le 29 septembre 1973 : 17 obus de différents calibres (75 à 240mm) sont été remontés.

Dès sa création en1976, la CPEPESC a soulevé périodiquement le problème de Jardel. En 1980, elle montre le problème à travers la réalisation du film « Il était autrefois des sources d’eau pure » projeté lors du premier colloque sur les eaux souterraines des régions calcaires en 1981.

A la suite, des milliers de personnes ont pu voir ce film et découvrir le stock d’obus souterrain de le ruisseau souterrain du fond de Jardel .

D’autres inspections du gouffre suivirent jusqu’à nos jour, souvent indirectement suscitées par interventions ou des articles de presse.
A ce sujet, il est amusant de citer un court extrait du rapport d’inspection des démineurs du 15 juillet 1982 (inspection du 6 juillet 1982):

« …Enfin il est souhaitable de « dégonfler » le problème du gouffre de Jardel et de la ramener à de justes proportions ; beaucoup de journalistes et certaines commissions dites écologiques mènent depuis des années une campagne de presse alarmante et injustifiée en se basant sur des « on dit » et sur des affirmations trop hâtives et non contrôlées. Si ma récente visite dans le gouffre « n’apporte qu’un peu plus de confusion » (citation de la CPEPESC du 13/7/82) je pense pour ma part que la confusion règne dans certaines têtes mal ou pas du tout avisées de ce genre de problème et qui désirent se faire entendre à tout prix… ».

Pas de trou de mémoire à la CPEPESC où ce dossier reste ouvert

La position de l’association est restée permanente.
Dans l’Est Républicain du 10 novembre 1988, on pouvait lire « … devant les inquiétudes formulées à plusieurs reprises par les défenseurs de l’environnement et la CPEPESC, la préfecture fit procéder il y a quelques années à une étude scientifique qui conclut à toute absence de risques.
Un optimisme contesté par la CPEPESC qui estime que les obus de Jardelle constituent une décharge sauvage imputable à l’Etat qui, appliquant ses propres lois, devrait la supprimer ».

Le pollueur ne sera pas le payeur du nettoyage !

L’armée qui s’est débarrassé de ses obus dans un gouffre peut aujourd’hui se laver les mains. En effet en application de l’article 2 d’un décret n° 76-225 du 4 mars 1976, signé Jacques Chirac, « la recherche, la neutralisation, l’enlèvement et la destruction des munitions, mines, pièges, engins et explosifs sont de la compétence du ministre de l’intérieur, en tout temps, sur terrain civil ».!

On enterre bien les décharges !

En 2001, l’administration avec le concours d’une entreprise spécialisée dans les travaux périlleux envisageait la construction au fond du gouffre d’un sarcophage en béton pour isoler la montagne d’obus… Un peu comme on enterre les décharges…

Mais les auteurs du projet ignoraient peut- être qu’en période très pluvieuse la nappe du karst de ce secteur remonte de plus de 40m de hauteur au fond du gouffre…

Dossier au long cours, (et souterrain !), à suivre.
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Autre page plus récente sur le sujet :
A la recherche de la vérité au fond du gouffre poubelle militaire de JARDEL à Chaffois (25)