Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Atteintes à la conservation d’habitats d’espèces protégées. Un GAEC condamné en appel  

publié le8 décembre 2023

En 2020, le GAEC FIGARD dont le siège est situé sur la commune de FERRIERES-LES-SCEY (70) a procédé à diverses interventions ayant pour conséquence de réduire drastiquement la largeur et la densité des haies situées en périphérie d’un verger situé au lieu-dit La Miele sur le territoire de LA NEUVELLE-LES-SCEY avec à certains endroits l’arasement totale des formations arbustives. Le linéaire impacté couvrait environ 450 m.

Vue sur la haie sud. Bien qu’elle ait fait l’objet d’un girobroyage côté cultures, cette photo montre l’état de la haie (hauteur, densité) avant l’intervention de fin juin-début juillet 2020. A comparer utilement aux photos présentées plus bas en fin d’article.

A la suite de la plainte de la CPEPESC relevant l’atteinte portée à la conservation d’habitats d’espèces protégées et de l’enquête diligentée par l’OFB, le parquet a fait convoquer le prévenu, le GAEC FIGARD, devant le tribunal correctionnel siégeant à juge unique le 10 janvier 2023 pour y répondre du chef d’altération ou dégradation non autorisée de l’habitat d’une espèce animale protégée non domestique commis courant janvier 2020 et jusqu’au 31 janvier 2020. Il semble pourtant que les travaux aient été réalisés pour l’essentiel à une date plus avancée, soit entre fin juin et début juillet comme en témoignent les photos produites par l’association.

Par un délibéré du 28 février, le GAEC FIGARD a été déclaré coupable des faits qui lui étaient reprochés. Sur l’action publique, il a été condamné à une amende de 10 000 euros dont 5000 euros avec sursis, à la publication de la décision dans l’Est Républicain et les affiches de la Haute-Saône assortis de l’exécution provisoire. Le tribunal a également prononcé la remise en état des lieux, à savoir la replantation de 300 ml de haie dans un délai d’un an et sous astreinte journalière de 200 euros à compter de l’expiration dudit délai et pour une durée maximale de six mois.

Sur l’action civile, si le tribunal a déclaré recevable la constitution de partie civile de la CPEPESC et de la fédération départementale des chasseurs (qui s’est greffée par opportunisme sur ce dossier), il n’a accordé à l’une et l’autre que la somme d’1 euro symbolique découlant de l’atteinte portée à son objet social.

Devant la Chambre des appels correctionnels de la Cour d’appel de Besançon, la culpabilité du GAEC (et de son représentant Monsieur Bernard FIGARD) a été confirmée, les magistrats reconnaissant « ses nombreux antécédents en matière d’infraction d’atteintes à l’environnement, signe d’une propension constante à s’affranchir des règles de protection visant notamment à préserver l’habitat d’espèces protégées ».

Ce qui ne les a pas empêchés de réformer tant la peine que le montant – à juste raison – des réparations allouées aux parties civiles.

Le GAEC est condamné au paiement d’une amende de 5000 euros (plus de sursis mais le montant à régler au Trésor public reste inchangé) et a verser à la CPEPESC en réparation de son préjudice moral la somme de 500 euros (à l’identique pour la FDC 70).

Mais c’est surtout la reconnaissance du préjudice écologique et la réparation/compensation qui en découle qui mérite d’être soulignée

puisque la Cour ordonne, au titre de l’action civile (elle l’était seulement à titre de peine complémentaire devant le premier juge), la remise en état des lieux qui portera sur la replantation non plus seulement de 300 m mais de 450 m de haies dans un délai d’un an à compter de la décision devenue définitive du 28 février 2023 et sous astreinte journalière réduite à 50 euros pour une durée maximale de six mois passé ledit délai.

De même est également ordonnée ici la publication du dispositif du jugement aux frais du GAEC dans l’Est Républicain et les revues agricoles, la Haute-Saône agricole et la France agricole

Enfin, y ajoutant une somme supplémentaire en cause d’appel, les montants alloués au titre des frais exposés en première instance aux parties civiles sont confirmées.

Cet arrêt est somme toute conforme à ce qu’on pouvait attendre au vu de la jurisprudence disponible aujourd’hui en matière de réparation du préjudice écologique. On peut regretter toutefois que la peine d’amende n’ait pas été réévaluée à la hausse tant le prévenu a fait montre de désinvolture dans cette affaire, ne se sentant que peu concerné par la préservation de l’environnement, et alors même qu’il déclare des revenus particulièrement élevés au titre du « paiement vert » de la PAC.

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