Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

Inondations dans le bassin fermé de Saône (25) une situation à risques à prendre en compte !

publié le28 octobre 2005

Malgré les éternels avertissements des associations, on continue a porter gravement atteinte à l’intégrité de la zone d’expansion des inondations du bassin fermé du marais de Saône (urbanisation, remblais, dépôts divers,..)

Cette réduction de « la cuvette » peut avoir des conséquences dramatiques.

Lassée de prêcher dans le désert, ou d’intervenir sans effet, l’association a adressé en mai 2001 deux courriers significatifs, l’un au maire et l’autre au préfet, afin de mettre une bonne fois pour toutes ces autorités face à leurs responsabilités.

Lettre du 20 juillet 2001 au maire de Saône.

« A la suite de notre entrevue concernant le problème des inondations du bassin fermé du marais de Saône, nous avons l’honneur de vous confirmer la position de notre association et vous apporter des renseignements utiles concernant la gestion de ce problème.

Nous nous permettons d’insister sur la pertinence de notre intervention, non seulement en regard de la protection d’un milieu naturel fragile de grande valeur, de la dynamique des crues dans le bassin du Doubs, de la protection de la principale ressource en eau de l’agglomération bisontine, mais aussi de la SÉCURITE DES POPULATIONS.
…..
Nous vous remercions d’avoir refusé les permis de construire de bâtiments en zone inondable et nous vous en félicitons. Selon l’article R 111-2 du Code de l’Urbanisme, le permis de construire peut être refusé sur des terrains exposés aux inondations, au motif de sécurité publique, même en application de l’article R 111-1 dans les communes dotées d’un POS.

Il serait cependant judicieux de modifier ce POS pour rendre inconstructible la petite partie inondable qui pose problème, et ce pour les raisons exposées plus loin. La modification donne aux collectivités locales la possibilité d’apporter des changements partiels et limités au POS. (Un POS approuvé peut être modifié par délibération du conseil municipal après enquête publique, à la condition qu’il ne soit pas porté atteinte à son économie générale).

Il serait également urgent et souhaitable, pour les mêmes raisons et la sécurité publique, que votre municipalité interdise par arrêté tout remblai visant à restreindre la zone inondable. En effet, ces remblais réduisent peu à peu la capacité du « réservoir » et augmentent en contrepartie l’amplitude des crues et de la hauteur d’eau.

En ce qui concerne la mise en place d’un Plan de Prévention des Risques, cette décision est du ressort de l’État. Selon la jurisprudence, le défaut de limitation dans un délai raisonnable de terrains exposés à un risque spécial est de nature à engager sa responsabilité.

Compte tenu des éléments ci-après, notre association estime que le bassin fermé de Saône présente bien un risque spécial et qu’il ne faut pas attendre l’accident pour y faire face.

Notre association s’est donc adressée au Préfet dans un courrier daté du 23 mars 2001 pour réclamer la mise en place d’un PPR « Inondations », et ce dans le cadre de l’article 18 de la Loi sur l’Eau qui prévoit que : « Le préfet et le maire intéressés doivent être informés, dans les meilleurs délais, par toute personne qui en a connaissance, de tout incident ou accident présentant un danger pour la sécurité civile, la qualité, la circulation ou la conservation des eaux… ». Vous trouverez ci-joint copie de cette lettre au Préfet.

La mise en place de ces PPR est prévue par l’article 16 de cette même Loi sur l’Eau (n°92-3 du 3 janvier 1992) :
« Dans les parties submersibles des vallées et dans les autres zones inondables, les plans de prévention des risques naturels prévisibles institués par la loi n°87-565 du 22 juillet 1987 (modifiée par la loi du 2 février 1995 et repris dans les articles L 562-1 à L 562-8 du Code de l’Environnement) relative à l’organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l’incendie et à la prévention des risques majeurs définissent en tant que de besoin les interdictions et les prescriptions techniques à respecter afin d’assurer le libre écoulement des eaux et la conservation, la restauration ou l’extension des champs d’inondation. »

Voici enfin le résumé des éléments sur lesquels notre association se base pour réclamer cette procédure, seule efficace en regard de notre droit à protéger définitivement la capacité d’expansion des inondations et les intérêts des populations et de leur sécurité.

> Le marais de Saône constitue le fond d’un vaste bassin fermé dont le seul exutoire efficace est constitué par les sources d’Arcier. Le débit maximum de cette résurgence se révèle inopérante à évacuer d’importantes pluviométries. Cette cuvette est l’aboutissement d’un gigantesque bassin versant karstique périphérique (de Mamirolle à Gonsans).

> En l’absence d’un trop plein naturel, il est donc impossible de fixer un niveau maximum aux inondations. Mais artificiellement, cette cote se révèle être celle de la bordure de la tranchée de la rampe d’entrée du tunnel SNCF de la Voie Besançon – Morteau. Nous avons constaté que le niveau des récentes inondations s’élevait à moins d’un mètre de cette tranchée.

> En cas de débordement des eaux dans ce tunnel, cela aurait par ailleurs obligatoirement des conséquences graves dans cette infrastructure et au niveau du village de MORRE …

> Enfin, il n’est guère envisageable de chercher à solutionner le problème en creusant une galerie d’évacuation vers la vallée du Doubs, ce qui aurait pour conséquence d’augmenter l’amplitude des inondations de cette rivière. Le marais de Saône et le « goulot » d’évacuation vers Arcier (la perte du Creux-sous-Roche) constituent un système régulateur qu’il faut préserver en le gérant correctement.

> Or, la capacité de la cuvette du marais a été considérablement réduite ces dernières décennies par :

*la construction en remblai de l’aérodrome,

*la construction de la zone industrielle,

*l’avancée des remblais à la périphérie,

*la création d’étangs et de digues,

*la construction de la STEP,

*la réalisation de la déchetterie,

*le développement de l’urbanisation au niveau du village,

*enfin, cerise sur le gâteau : la construction de la salle des fêtes !

Il est certain que l’enchaînement incompréhensible de telles aberrations est de nature, en cas d’accident météorologique, à engager la responsabilité des pouvoirs publics ; ceci d’autant plus que Saône dispose à sa périphérie, en zone haute, de suffisamment de terrain urbanisable en toute sécurité.

Lors de notre entrevue, notre association a été heureuse de trouver une équipe nouvelle qui veut ouvrir les yeux et mettre fin à ces incohérences dans l’intérêt de tous et de l’environnement.

La Commission de Protection des Eaux donc reste à la disposition de votre municipalité pour évoquer plus précisément tous ces problèmes et aider à trouver une solution.

Enfin, notre association ne perd pas de vue tous les problèmes affectant la qualité du marais : rejets périphériques directs ou dans le bassin versant.

En vous remerciant par avance des efforts que la commune va réaliser pour préserver au maximum la qualité et le devenir du marais, …

Lettre adressée le 23 mars 2001 au Préfet du Doubs

« Une nouvelle fois, le bassin fermé de SAÔNE est concerné par d’importantes inondations dont l’amplitude trouve origine dans l’abondance des pluies, mais aussi dans le remblaiement insidieux et progressif de la zone inondable, et dans l’urbanisation. Ces comportements paraissent ne jamais devoir s’arrêter.

Dans le passé, l’extension de la zone industrielle avait poussé son remblai sur le marais ; il en a été de même pour celle de la piste actuelle de l’aérodrome de LA VEZE, et plus récemment encore pour la déchetterie. La commune montre une fois encore le « mauvais exemple » en édifiant actuellement sa salle des fêtes en zone inondable.

De plus, le long de la route reliant la zone industrielle au village, des panneaux proposent même à la vente des terrains inondables (et en ce moment inondés !). Partout des déversements de gravats et de remblais sont effectués sur la zone inondable, ainsi progressivement réduite. (Voir les photos et l’extrait de journal ci-joints)

Paradoxalement, la commune dispose, à la périphérie du village, sur les hauteurs, d’immenses terrains hors de toute atteinte des eaux.

Devant tant d’incurie, et avant qu’il ne se produise des accidents graves, la Commission de Protection des Eaux, relayant une opinion publique de plus en plus alarmée par ces faits, demande au Représentant de l’État d’ordonner la mise en place au plus vite d’un PPR « Inondations » (Plan de Prévention des Risques), prévu par la loi, au niveau du bassin fermé de Saône, pour protéger ce qui reste de la zone d’expansion des crues.

En effet, la situation critique de cette cuvette naturelle, alimentée par un très grand bassin versant, et de l’évacuation « difficile » de ces eaux par un système souterrain complexe, perte du « Creux-sous-Roche vers la source d’ARCIER », présente un risque potentiellement grave dont il faut prendre la mesure, et auquel il faut donner des réponses d’urgence en matière de sécurité publique et de protection de l’environnement. Remblayer ou construire en zone inondable est ici plus qu’ailleurs intolérable !

Madame la Ministre de l’Environnement ayant récemment réaffirmé la volonté de l’État, crédits à l’appui, de mettre en place des PPR dans toutes les zones à risques, nous vous remercions de bien vouloir prendre en compte cette demande pour que soient enfin garanties la sécurité et la protection durable de l’environnement au niveau du bassin fermé inondable de Saône ».

La réponse tardive du Préfet

La demande de mise en place d’un PPR inondations pour le bassin fermé de Saône est restée sans réponse du Préfet jusqu’en février 2005. L’association ayant à nouveau solicuté le représentant de l’Etat à ce sujet, d’ailleurs à l’occasion d’un nouveau remblai, le préfet a enfin fait connaître sa réponse dans un courrier du 28 février 2005 :

« S’agissant d’un Plan de Prévention des Risques inondations (PPRI) sur la commune de Saône et son marais, celui-ci n’est pas dans les priorités actuelles des services de l’Etat qui oeuvrent actuellement sur les PPRI de 185 communes riveraines de la Savoureuse, de l’ Allan, de l’Ognon, de la Loue et du Doubs.

Telles sont les informations que je suis en mesure de vous apporter ».