Commission de Protection des Eaux, du Patrimoine, de l'Environnement, du Sous-sol et des Chiroptères de Franche Comté

BIODIVERSITÉ :  Le cuivré des marais n’a qu’à déménager selon la DREAL !

publié le28 août 2023

Dans une affaire datant de 2017-2018 de destruction d’habitats d’espèces protégées et de retournement de prairie en zone humide, la CPEPESC avait obtenu le 6 août 2020 devant le Tribunal administratif de Besançon l’injonction faite à la préfète de la Haute-Saône de mettre en demeure, dans un délai d’un mois les responsables des travaux de déposer un dossier de demande de dérogation à la destruction de l’habitat du Cuivré des marais, papillon diurne protégée.

Le 6 avril 2021, la CPEPESC avait demandé copie à la DREAL des documents administratifs élaborés à la suite de la mise en demeure adressée le 29 octobre 2020 par l’administration au GAEC des Prottes de régulariser les travaux de retournement de prairies entrepris illégalement sur le territoire des communes de Lavigney et Malvillers (70). A savoir :

1) L’étude ayant déterminé la qualité de la prairie humide à Cuivré des marais préexistante aux travaux de retournement de prairie, distingué les zones favorables au Cuivré des marais et évalué l’impact des travaux de retournement de prairie sur les zones favorables à l’espèce et les mesures de compensation,

2) Le dossier de demande de dérogation au titre de l’interdiction de détruire, altérer ou dégrader des sites de reproduction ou des aires de repos du Cuivré des marais en application de l’article L. 411-2 du code de l’environnement.


En l’absence de réponse de la DREAL,

l’association saisissait le 20 mai 2021 la CADA qui, le 17 juin 2021, rendait un avis favorable à la communication de ces documents.

Devant le refus persistant de l’administration de communiquer l’intégralité des pièces demandées, le 09 novembre 2021 la CPEPESC attaquait ce refus tacite devant le Tribunal administratif.

L’action avait réveillé la DREAL qui le 27 octobre 2022 transmettait à l’association l’étude écologique mais pas le dossier de demande de dérogation au titre de l’interdiction de détruire, altérer ou dégrader des sites de reproduction ou des aires de repos du Cuivré des marais.

Au final, le tribunal administratif relèvera que le dossier de demande de dérogation au titre de l’interdiction de détruire, altérer ou dégrader des sites de reproduction ou des aires de repos du Cuivré des Marais en application de l’article L. 411‐2 du code de l’environnement n’existe pas et condamnera l’État le 3 mars 2023 à verser 520 € à l’association.

Ce n’est que le 29 décembre 2022 que le préfet de la Haute-Saône adressera un courrier de mise en demeure

ordonnant au GAEC des Prottes de produire le détail des mesures d’accompagnement en exécution a priori du jugement du tribunal administratif du 6 août 2020. Sauf que ce ne sont pas de simples mesures d’accompagnement mais bien la production d’une demande de dérogation avec proposition de mesures compensatoires qui était attendue dans le délai de 3 mois alors imparti à compter de la notification de l’arrêté préfectoral du 29 octobre 2020.

Constatant dès lors que l’administration opérait un revirement de situation en jugeant désormais qu’il n’est plus nécessaire de déposer un dossier de dérogation au régime de protection des espèces protégées, la CPEPESC adressera un recours amiable au préfet le 21 février 2023 lui demandant d’ordonner, en application des dispositions de l’article L. 171-7 II du code de l’environnement, « la remise des lieux dans un état ne portant pas préjudice aux intérêts protégés par le présent code », c’est-à-dire d’ordonner le rétablissement des prairies concernées dans leur état prairial humide antérieur, constitutif d’un habitat utilisable par l’espèce protégée visée par la décision du Tribunal administratif.

Le Cuivré des marais n’a qu’à déménager


Dans sa réponse du 12 avril 2023, la DREAL, s’appuyant sur l’étude orientée du BE EMC Environnement, estime que le Cuivré des marais est une espèce qui peut facilement se déplacer et prospecter de nouveaux milieux, qu’au sud du terrain litigieux des parcelles réunissent les conditions pour l’accueillir et va même jusqu’à minimiser l’importance de la surface de prairies retournées. Jugeant l’impact résiduel de l’opération litigieuse non significatif, elle persiste dans son refus d’exiger de l’auteur des travaux le dépôt d’un dossier de dérogation.  

Confrontée à cette position inique, la CPEPESC saisira le 9 mai 2023 le tribunal administratif d’une nouvelle requête de pleine juridiction contre le refus explicite de Monsieur le Préfet de la Haute-Saône d’ordonner la remise en état, en vertu de l’article L. 171-7-II du code de l’environnement, des parcelles situées sur les communes de MALVILLERS et de LAVIGNEY ayant fait l’objet en 2017-2018 de travaux de retournement de prairies préjudiciables à la survie du Cuivré des marais.

Cette affaire de travaux sauvages a également été portée devant le juge civil. La décision est attendue sous peu. 

A suivre.
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