Observations déposées par la CPEPESC lors de l’enquête publique concernant le captage de Ouhans à la source de la Loue.
Le 6 mars 2015, la CPEPESC a adressé ses observations à Madame VOILLEY, Commissaire enquêteur, concernant l’enquête publique au sujet des périmètres de protection du captage de la Source de la Loue par la commune de OUHANS.
« Le projet, que nous avons consulté en mairie, aurait pu rappeler en préliminaire que l’eau de cette source est captée et utilisée depuis la fin du 18° siècle, remontée par pompage à Ouhans. Son captage affiche en quelque sorte un droit d’antériorité par son ancienneté sur l’utilisation de l’eau dans son bassin versant. Cette source n’a jamais bénéficié du moindre périmètre de protection. Il serait souhaitable que ces nouveaux périmètres soient utiles et non définis uniquement pour se conformer à la loi.
En ce qui concerne les observations du géologue officiel, la CPEPESC tient à préciser plusieurs points :
– La turbidité fréquente des eaux de la source qu’il souligne, est un phénomène normal dans les résurgences karstiques alimentées par des conduits souterrains bien développés. Cette turbidité est constituée pour l’essentiel d’argiles de décalcification. Ce résidu de la dissolution lente des roches calcaires par l’eau se dépose dans les conduits souterrains lorsque les écoulements y sont lents (période d’étiage). Cette argile peut être remise brutalement en suspension dans les eaux, lors des mises en charge par la violence des crues à la suite de pluies abondantes, colorant les résurgences en marron.
Par contre cette turbidité peut aussi présenter une charge organique et bactérienne provenant de rejets pollués dans le sol du bassin versant (déversoirs de STEP, puits perdus, dépôts de déchets. d’où la nécessité d’un strict grand respect des règles sur tout bassin versant de la source captée pour limiter la pollution et ses risques. (D’autant que les eaux de la Loue ne sont pas captées qu’à sa source, mais aussi en aval à Lods, Montgesoye, Chenecey (pour Besançon).
La turbidité peut être éliminée par décantation, floculation, filtration au niveau du captage avant le traitement de stérilisation des eaux.
– La bactériologie de cette source est marquée par la présence fréquente de germes fécaux. Ceux-ci proviennent surtout de déversements sauvages de lisier ou d’épandages de déjections animales dépassant les capacités d’assimilation des sols ( ou encore épandage sur neige ou sol gelé ou gorgé de pluie) et aussi des puits perdus d’habitations non reliés à un réseau d’égouts publics dont les assainissements unitaires ne sont pas aux normes.
– Les micropolluants ne font l’objet que d’une détection dite « exceptionnelle ». Nous ferons remarquer que ces types d’analyses ne sont qu’épisodiques. Là encore une très grande vigilance serait nécessaire sur tout le bassin versant.
– En ce qui concerne la « remarque « sur les « mortalités inexpliquées de salmonidés sur tout le cours de la Haute-Loue », nous tenons à préciser que ceci n’est pas exact et , en tout cas, pas sur la très haute vallée de la Loue. En effet ces mortalités n’ont été à ce jour relevées qu’à partir du bourg de LODS et en aval. Au niveau de ce village plusieurs résurgences importantes apportent leurs eaux à la Loue. Il ne semble donc pas, que la source de la Loue puisse être particulièrement mise en cause.
– En ce qui concerne, le paragraphe « Environnement vulnérabilité », celui-ci est bien modeste et ne fait que survoler les problèmes, ce qui confine à les minimiser.
Ce n’est pas « l’environnement karstique » qui « entraine des rejets fréquents » vers le milieu souterrain mais bien les comportements ne respectant par les règles encouragés par quasi absence de vraie police des eaux et de l’environnement sur le terrain.
Nous ne citerons qu’un exemple :
Un déversement de matières fécales et d’eaux usées dans une doline située à 4 kilomètres à peine en amont de la résurgence de la source de la Loue, source est par ailleurs captée pour l’alimentation en eaux des habitants de la commune de Ouhans ». En octobre 2014, l’association a dénoncé au Procureur de la République un « gros tuyau qui débouche dans une doline et y déverse de dégoutantes eaux grises chargées de matières fécales et des papiers toilettes… » en infractions au Code de la Santé, rejet d’eaux usées dans le sol sans autorisation préalable, etc…
Vous trouverez d’édifiantes photos de ce rejet sur notre site :
Ces dernières années un effort important a été effectué pour équiper la totalité des agglomérations en stations d’épuration. Il reste a exiger aujourd’hui un bon fonctionnement permanent partout et à conserver au fil du temps de bons rendements d’épuration.
La mise aux normes des bâtiments d’élevage n’a pas réglé tous les problèmes, il suffit pour s’en rendre compte d’approcher les sièges de quelques élevages… L’existence de nombreux plans d’épandage de lisier dans le bassin versant de la Loue aurait méritée d’être analysée compte tenu de leur impact hydrogéologique marqué sur les eaux. En effet la surface disponible pour l’épandage des déjections animales est elle encore suffisante dans le bassin versant compte tenu du cheptel et de l’aptitude des sols puisqu’il existe toujours des rejets sauvages de lisier et des épandages hors période de possibilité? N’excède- t-on pas les pouvoirs épurateurs des sols lors des épandages comme certains le prétendent ?
Ces observations étant faites, l’association relève que le projet ne fixe des règles qu’au niveau des PPI (périmètre de protection immédiat) et PPR (périmètre de protection rapprochée) mais presque rien pour le PPE (périmètre de protection éloigné) qui inclut environ 35 communes dont Pontarlier. Celui-ci ne prévoit que « d’éventuelles mesures de protection du captage et un schéma d’alerte ». Ceci semble bien désuet et dérisoire contre les déversements polluants pouvant aboutir en quelques heures à la source !
La loi prévoit qu’un PPE n’est pas obligatoire mais « le cas échéant » s’impose. Effectivement c’est le cas pour le captage de la Loue compte tenu des caractéristiques hydrogéologiques de cette source exutoire d’un ensemble karstique où certaines activités sont/peuvent être à l’origine de pollutions importantes (organiques, bactériologiques, chimiques) ce qui nécessite des prescriptions particulières de nature à réduire significativement les risques.
Le rapport donne l’exemple d’une réapparition des eaux perdues par le Doubs à l’aval de Pontarlier au bout de 48 heures à la source de la Loue. Ces temps de passage peuvent être d’ailleurs beaucoup plus courts pour des infiltrations de polluant plus proche (comme à la Vrine) exemple précité.
Ce PPE devrait avoir une réalité à travers ses prescriptions. Or se limiter à un schéma d’alerte pollution sur le bassin versant pour limiter les risques est certes utile mais insuffisant et ne pourra concerner que les pollutions bien visuelles…
L’article R1321-13 du Code de la Santé publique stipule d’ailleurs clairement que :
« A l’intérieur du périmètre de protection éloignée, peuvent être réglementés les travaux, installations, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols qui, compte tenu de la nature des terrains, présentent un danger de pollution pour les eaux prélevées ou transportées, du fait de la nature et de la quantité de produits polluants liés à ces travaux, installations, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols ou de l’étendue des surfaces que ceux-ci occupent ».
Nous comprenons que compte tenu de l’étendue du bassin versant et des nombreuses sources potentielles et variées de pollution s, déversements résiduaires ou autres dans le karst par exemple, il n’est pas envisageable de fixer des règles spécifiques s’ajoutant à la réglementation générale existante pour les activités en cause sur un territoire dont la commune exploitante du captage n’a d’ailleurs pas la maitrise.
Néanmoins, le règlement du PPE devrait à minima comporter au moins une prescription générale du genre :
– Un strict respect de la réglementation existante en matière d’eau, de rejets, d’épandage agricole, d’activités et de stockages de produits à risque de pollution des eaux souterraines.
Elle n’ajoute en rien à la charge communale mais renforce l’exigence de résultats en engageant clairement la responsabilité des éventuels pollueurs du captage de la Loue.
Enfin, ce qui concerne les PPI et PPR l’association n’a pas d’observations à formuler sur les dispositions envisagées.
Pour conclure, notre association souhaite donc que Madame la Commissaire enquêteur délivre un avis favorable au projet de périmètres de protection du captage de la Loue mais en assortissant cet avis d’une réserve conditionnelle à lever par l’intégration d’une prescription au PPE pour exiger : « – un respect strict de la réglementation existante en matière d’eau, de rejets et d’épandage agricole, d’activités et de stockages de produits à risque de pollution des eaux souterraines ».
Pour la CPEPESC.
F. Devaux.