Dépôt des déchets dans l’environnement : pouvoirs de police du maire (et du préfet)
( m. à j. 01/05/2015)
Toute personne concernée ou toute association peut dénoncer au maire un dépôt sauvage de déchets et lui demander de mettre en demeure le responsable de les évacuer et de les éliminer conformément à la réglementation sous un délai raisonnable.
Pouvoirs de police en matière de déchets
En la matière, indépendamment des sanction pénales est prévue une procédure de police administrative.
Selon l’article L541-3 I du code de l’environnement, lorsque des déchets sont abandonnés ou gérés contrairement aux prescriptions l’autorité titulaire du pouvoir de police doit intervenir selon une procédure prévue.
Voir l’intégralité de l’article L541-3 I du code de l’environnement,
C’est au maire d’agir au titre des pouvoirs de police municipaux que lui donnent les articles L2212-1 et 2 du CGCT
L’article L2212-2 du CGCT stipule clairement que : « La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment :
… 5º Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature… »
Il est conseillé au maire de rechercher un accord amiable avec le contrevenant ou le propriétaire du terrain pour l’évacuation rapide dans les règles de déchets.
Mais en l’absence de solution amiable, les dispositions combinées de l’ article L. 2212-2 du CGCT et de l’article L. 541-3 du code de l’environnement permettent au maire de mettre en demeure le responsable des déchets déposés et en cas de refus d’assurer d’office l’élimination de ces déchets aux frais du même responsable.
Problème : Le maire peut il mettre en cause la responsabilité du propriétaire ou de l’occupant du terrain sur lequel a eu lieu le dépôt, s’il n’est pas responsable du dépôt de déchets?
OUI répond une circulaire du 27/06/03 : « Cette mise en demeure sera adressée à l’auteur des dépôts pour autant qu’il soit identifié ou à défaut au propriétaire du terrain, en sa qualité de détenteur des déchets, en application de l’article L. 541-3 précité. La mise en demeure doit être assortie d’un délai de réalisation qui doit être fixé en fonction de la gravité des nuisances à faire cesser ». (Circ. du 27/06/03, partie II. « Les outils juridiques pour supprimer ou mettre en conformité les dépôts »)
OUi, selon le Conseil d’État qui dans un arrêt du 26 juillet 2011 a retenu que le propriétaire des terrains sur lesquels ont été entreposés des déchets, peut en l’absence de détenteur connu de ces déchets, être regardé comme leur détenteur au sens de l’article L. 541-2 du Code de l’environnement, notamment s’il a fait preuve de négligence à l’égard d’abandon sur le terrain. Il a précisé que la seule qualité de propriétaire du site sur lequel ont été entreposés des déchets leur confère la qualité de détenteur (et responsable au sens de l’article L. 541-3) de ces déchets.
En cas d’inaction du maire, se tourner vers le préfet
En cas de carence du maire, c’est-à-dire par exemple en cas de refus écrit ou tacite (2 mois sans réponse) d’intervenir de celui-ci à une demande d’intervention pour faire supprimer un dépôt de déchets, il faut alors se tourner vers le préfet en lui demandant d’agir.
Cette substitution du préfet au maire en cas de carence de ce dernier dans l’exercice de ses pouvoirs de police administrative spéciale relative aux déchets se fonde sur la jurisprudence d’un arrêt du Conseil d’État :
« Considérant [ … ] que les articles L. 541-1 et suivants du code de l’environnement ont créé un régime juridique destiné à prévenir ou à remédier à toute atteinte à la santé de l’homme et à l’environnement causée par des déchets, distinct de celui des installations classées pour la protection de l’environnement ; qu’à ce titre, l’article L. 541-3 confère à l’autorité investie des pouvoirs de police municipale la compétence pour prendre les mesures nécessaires pour assurer l’élimination des déchets dont l’abandon, le dépôt ou le traitement présentent de tels dangers ; que ces dispositions ne font toutefois pas obstacle à ce que le préfet, d’une part, en cas de carence de l’autorité municipale dans l’exercice des pouvoirs de police qui lui sont conférés au titre de la police des déchets, prenne sur le fondement de celle-ci, à l’égard du producteur ou du détenteur des déchets, les mesures propres à prévenir toute atteinte à la santé de l’homme et à l’environnement […]. » (Min. écol. c/Société Barbazanges Tri Ouest, n° 287674).
Le Conseil d’État ne subordonne pas l’application de la police des déchets par le préfet à une mise en demeure préalable adressée au maire, d’avoir à mettre en œuvre ses pouvoirs de police, ou à un constat formalisé de carence. Dans ces conditions , le préfet peut justifier pour faire application de l’article L 541-3 du code de l’environnement d’une simple absence d’intervention du maire. (En effet la substitution du préfet au maire dans d’autres situations que celles des affaires « déchets » est prévue par l’article L2215-1 du Code général des collectivités territoriales, mais cette substitution là, ne peut avoir lieu qu’après une mise en demeure adressée au maire sans résultat.)
Le Conseil d’État a jugé en outre qu’en cas de carence de l’autorité municipale dans l’exercice des pouvoirs de police qui lui sont conférés au titre de la police des déchets, le préfet a l’obligation de prendre sur le fondement de ces dispositions, à l’égard du producteur ou du détenteur des déchets, les mesures propres à prévenir toute atteinte à la santé de l’homme et à l’environnement .
En cas de refus du Préfet écrit ou tacite
Il ne restera plus que la solution d’un recours devant le Tribunal administratif auquel il sera demandé d’annuler le refus du Préfet et de lui ordonner d’agir sous délai et astreinte financière en cas de retard.
(Mais pour être recevable devant la justice administrative, le requérant devra au préalable démontrer son intérêt à agir, ce qui est plus facile pour une association de défense de l’environnement que pour un particulier sauf riverains du dépôt de déchets ou personne en subissant les nuisances).
On le voit il est plus facile de jeter des déchets dans l’environnement que de les faire enlever.
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C’est bien au maire d’agir en premier lieu.
Jurisprudence. Les dispositions des articles L 541-2 et L 541-3 du code de l’environnement ne donne compétence qu’à l’autorité de police municipale pour en assurer leur application. ( Le préfet du Calvados, qui avait pris sur le fondement, de ces articles, un arrêté de mise en demeure d’élimination d’un stock de piles usagées, a été jugé incompétent, Son arrêté du 9/7/2003 a été annulé par la Cour administrative d’appel de Nantes (CAA Nantes, 18/04/06, Syndicat mixte intercommunal de la vallée de l’Authion, n° 05NT00316).
Si la mise en demeure adressée par le maire au responsable reste sans effet.
Si les déchets restent en place au terme du délai fixé, le maire, après saisine le juge des référés du Tribunal de Grande Instance, peut aire procéder à l’exécution d’office des travaux aux frais du responsable, en se fondant notamment sur l’article L. 541-3 du Code de l’Environnement.
Cas de déchets provenant d’une installation classée
Au titre de la législation déchets, le maire peut mettre en demeure le détenteur des déchets même issus d’une installation classée, ce qui peut inclure le propriétaire du terrain du dépôt.
Alors qu’au titre de la législation installations classées, le préfet ne peut mettre en demeure que le dernier exploitant d’éliminer les déchets issus d’une ICPE mais pas le propriétaire du site en cette seule qualité.
Cas d’un importante décharge sauvage organisée
Dans le cas d’une très importante décharge sauvage (régulièrement utilisée, volume conséquent de déchets non inertes,..), celle ci-peut, au regard de la loi, constituer une installation classée (rubrique 2760) exploitée sans autorisation préfectorale. Il appartient alors aussi au préfet responsable de la polices des installations classées d’agir et de mettre en demeure le détenteur des déchets, indépendamment des très fortes sanctions pénales prévues pour un tel délit (**).
(*) et (**) voir : DÉCHETS DANS LA NATURE : sanctions pénales.